mercredi 24 novembre 2010

Soleil, feuilles mortes et art (de vivre) à la berlinoise

Une autre copine qui vient me rendre visite alors on se remet en mode tourisme! Un tourisme culturel. Soft. Un blitz de 5 jours.

Dans le désordre d’automne.

Un événement: je suis allée au Berliner Ensemble pour la première fois. Un autre théâtre, il était temps! Le théâtre de Brecht. Voir une pièce de Brecht. Tsé. Im Dickicht der Städte. Et j’ai compris: Dans la jungle des villes. Un titre inspirant. Une mise en scène qui l’est moins…

repertoire_bec0449199a69162b02e8139ef0196aa© Photo Barbara Braun

C’est pas vrai qu’il faut comprendre ce qui est dit sur scène pour apprécier une mise en scène. C’est sûr que ça aide, surtout si c’est du Régy, mais là, c’est pas du Régy c’est du Brecht. Pis on est dans SON théâtre. Je comprends pas. Je suis outrée. Et je ne suis pas outrée souvent depuis que je suis à Berlin. Mais là, je crie –presque- au scandale: mais kessé ça cette mise en scène-là??? Je vais pas tomber amoureuse de Katharina Thalbach! Nein, nein, nein! Le début est assez intéressant scénographiquement, mais ça s’épuise. Le plateau possède une surface circulaire qui tourne et ça fait partie du théâtre. Il faut savoir s’en servir. Ce qui n’est visiblement pas le cas ici. Et puis, elle est où la distanciation brechtienne??? Heille la grande! Du Brecht, ça se joue pas de manière classique! C’est pas pour rien que tous les grands metteurs en scènes sont des hommes: exit l’émotion, welcome la réflexion. Cela dit, je n’ai rien contre l’émotion. Mais c’est pas comme ça qu’on monte Brecht. Il critique justement ça!!! Et le jeu des acteurs… Calvaire! En plus d’être ordinaires, c’est pas mal sur eux que reposent la mise en scène. Et c’est probablement la principale raison de l’échec de cette mise en scène: les acteurs brechtiens ne doivent JAMAIS  être le centre d’attention, mais des éléments parmi d’autres. Exit l’égocentrisme. En plus, il y a un entracte. Je déteste les entractes. La moitié de la salle en profite pour s’en aller en courant. Mais moi je fais jamais ça. Des fois que je manquerais un moment de grâce. Mais bon, ce sera pas pour aujourd’hui. Pour 5€ on va pas brailler sa vie, hein? On va essayer d’aller voir Peter Stein la prochaine fois.

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Et pour nous montrer que tout n’est pas perdu, la Andcompany&Co directement venu du Brésil, nous prouve qu’il est possible de monter Brecht comme il se doit avec FatzerBraz à Hebbel am Ufer, Hau 3. Première expérience au Hau 3. Je ne suis pas déçue! Rincez-vous l’oeil!

Je regrette de ne pas parler allemand et espagnol dans ce temps-là! J’ai vraiment eu l’impression d’assister à quelque chose. Très près de l’humain. Une performance vivante. Critique. Engagée. Pure. On se questionne. On interroge la forme. On tente de tisser des liens. Franchement, digne de mention. Brecht n’est pas mort. Dieu merci.

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Potosi Principle @ Haus der Kulturen der Welt

Bon. J’ai jamais rien vu comme ça de toute ma vie. C’est extrêmement dense et difficile à expliquer. C’est une expo sur l’accumulation. Et je crois que ça prend minimum 6 heures pour voir tout ce qu’il y a à voir. Et pour tout comprendre, je pense que ça doit prendre une vie. Mais franchement, ça vaut le détour. Vous avez jusqu’au 2 janvier 2011. Si jamais vous passez dans le coin…

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Un cinéma intéressant : Arsenal

Pour la première fois, je vais au cinéma. En fait, je crois que je ne suis pas allée au cinéma depuis que je suis partie en mars dernier. Tsé, entre un film à 6,50€ ou une pièce du théâtre à 8€, demandez-moi donc ce que je préfère! Mais ce fut une agréable soirée. Juste pour dire que c’est ben le fun d’avoir un cinéma de répertoire.  J’ai beaucoup à apprendre côté ciné…

 

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Un bar dont je me souviens pas du nom… Réussir à trouver l’endroit, c’est avoir le droit d’y être. Et l’étampe du jour est : “all you need is ME”. Ironie.  Un bar qui ressemble à rien de ce que j’ai vu à Berlin ici côté musical. Swing, rock’n’roll et folk. Petite piste de danse au centre de la place. Nice DJ. Une petite pensée pour le Big Hands à Manchester… Mais avec des bonus : on peut siroter tranquillement son Weißwein sur le bord des fenêtres qui donnent sur Skalitzer Straße et Kotbusser Tor. Un voyage dans le temps. Fort agréable. Et on peut parler. Et c’est rempli de beaux allemands.

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Hamburger Bahnhof. Le musée d’art contemporain. Like it. Bon. J’ai pas pu voir tout ce que je voulais voir parce qu’une partie est en reconstruction ou en train de se préparer pour la prochaine expo, mais quand même! Juste le lieu en soi est assez impressionnant: c’est une ancienne station de train. Donc c’est huge. Et j’ai pu observer une chose étrange : on doit refaire chacune des salles en sens inverse pour sortir. Je ne suis pas habituée à ça moi. D’habitude quand je fini une salle, je continue vers la prochaine et encore vers la prochaine sans revenir sur mes pas et ce, jusqu’à ce que l’étage soit terminée. Quelque chose du cerveau allemand m’échappe ici. Pourquoi? Je n’ai pas la réponse. 

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Flohmarkt am Mauerpark. L’activité du dimanche. Un marché aux puces où on peut trouver de tout! Et on se laisser guider. On se perd. On sent les odeurs. On écoute la musique. On traîne. Et je pense que c’est un des premiers dimanches où il fait vraiment beau et chaud depuis un bon bout de temps. Alors on en profite pour se faire dorer au soleil. Un peu. Une belle journée d’automne. Et je me suis déniché un kit de couture: 6 grosses bobines de fil, 16 petites bobines de fil aux couleurs variées, ruban à mesurer, ciseaux, 30 aiguilles assorties, un dé à coudre, un découseur et des petits boutons le tout pour la modique somme de 2, 50€! Je n’ai plus aucune excuse pour ne pas recoudre mes boutons! Ou les trous dans mes Strümpfe.

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Brunch au Bar Gagarin: Prenzlauerg Berg est décidemment remplie de surprises…

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Dans ce petit Cafe-Bar, on y retrouve tout ce qui faut pour bien se nourrir! Comme on devait reculer l’heure en ce jour d’Halloween, on est prêtes pour le brunch du dimanche à 10h bien tapantes!!! Le lieu est déjà bondé, mais la terrasse est assez sympathique: chauffée, chaises en bois rouges, couvertures pour se réchauffer et vue sur la Wasserturm (un camp de concentration improvisé  à l’époque nazie reconverti depuis en logements). Faut comprendre que le brunch ici n’est pas comme un bon déjeuner dominical québécois… On oublie les 2 oeufs-tournés-bacon-cretons-saucisses-fèves-au-lard-avec-une-petit-crêpe-aux-bleuets-dans-le-sirop-d’érable-et-une-montagne-de-fruits-pis-des-toasts-avec-de-la-confiture! Nah! Ici, on se sert à volonté des petites choses diversifiées. C’est plus le mot “buffet” qu’il faudrait dire. Donc, on commence par un café –absolument délicieux en passant- et une montagne de fruits. Il y a même des pitayas roses dans la salade de fruits!!! Ensuite, ben on mange un peu de tout! Tout ça pour 12€. Wir sind zufrieden!

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Et puis je suis allée boire des capïrinhias au Wohnzimmer. Dans les sofas. Et pour le vintage. Mais surtout pour les capïrinhias. Franchement, je suis certaine que même au Brésil, ils ne font pas leurs drinks aussi forts. J’aime la lime bon. J’aime le cachaça bon. Et les deux ensemble font un heureux mélange dans ma bouche. Et le prix est plus qu’abordable si vous comptez la quantité d’alcool absorbée. Prost Nico!

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Tout ça en allant religieusement à mes cours d’allemand.

mardi 9 novembre 2010

Hamlet// Ostermeier// Schaubühne

Encore une fois. De la pure qualité allemande. J’avais seulement vu des extraits de cette mise en scène (la fin de l’extrait que j’ai choisi est délicieuse, vous verrez). La voir en vraie, c’est comme un rêve.  Devenu réalité. “Sein oder Nichtsein, das ist die Frage”. Il parait que je dois cesser d’aller à la Schaubühne. J’y vais trop souvent. Mais je ne suis pas capable d’arrêter. C’est comme des chips Humpty Dumpty à l’aneth: t’en goûte une pis tu te rends compte que t’as fini le sac. Anyway.

Une version assez contemporaine du fameux texte shakespearien. Enfin. Une mise en scène qui ose montrer une autre vision d’Hamlet. Bon. Je ne suis pas certaine que j’adhère totalement avec la vision du personnage vu par Ostermeier. Et parfois c’est à se demander si le grotesque est tout à fait à propos. Je veux dire: la majeure partie des scènes sont jouées dans un style quasi burlesque et on ne peut s’empêcher de rire devant certaines interprétations du texte. Je sais ben que Shakespeare est un maître du verbe, qu’il laisse le sens ouvert aux multiples interprétations et que les mots peuvent être pris au premier comme au deuxième degré. Mais quand même. Je pense pas que ce soit un humoriste… Cela dit,  on a droit à de la pluie (l’eau doit être un pré-requis dans les mises en scène d’Ostermeier!), de la terre, des ajouts textuels qui font référence au monde contemporain et des improvisations qui frôlent le cabaret… Ce qui n’est pas mal en soi. Et je dois même avouer que le procédé est franchement intéressant. Résolument de notre temps. On est parfois mal à l’aise. Et on aime ça. Mais à un moment donné, on se dit juste que tsé, Hamlet, c’est pas juste un gros cave qui n’a pas les idées claires… Je reste persuadée que la meilleure mise en scène ever, c’est celle de Castellucci -même si je n’ai vu que des extraits et des photos- où Hamlet est interprété par un autiste. Mais bon. Je suis pas objective, Romeo c’est mon âme soeur.

Bref, la scène de la souricière est particulièrement réussie sur tous les plans: le travestissement est on ne peut plus clair! Hamlet campe bien son/ses rôle-s. Le fameux soliloque d’Hamlet est répété 3 fois plutôt qu’une et c’est même avec la phrase la plus célèbre du monde entier que débute la pièce. Et la  finale est parfaite.

Hamlet parle la bouche pleine, se laisse tomber en pleine face dans la terre, fait un combat d’épée avec une cuiller… Au fond, ça change du personnage tourmenté qui se questionne sur : d’où vient le comment du pourquoi.  Les personnages de Gertrude (la mère d’Hamlet) et d’Ophélie sont joués par la même actrice, ce qui est assez évocateur et franchement bien pensé. En fait, la distribution est réduite à 6 acteurs et chacun trouve son alter ego, excepté Hamlet évidemment (Laertes et Rosenkranz  interprétés par le très sex Stefen Stern…).  Je pense que le terme “tragi-trash-comédie” convient bien ici. On ne s’ennuie pas. C’est brillant. Dégoulinant. Une scéno de feu. Des acteurs nés de Dieu. Une trame sonore efficace. Et poussé à l’extrême, le texte pend ici un tout autre sens. Juste, pas juste, je ne le sais pas. Mais à un certain moment, le procédé s’épuise un peu. C’est tout. Mais au fond, quand on va dans les extrêmes, aussi bien ne pas faire de compromis. “Sterben – schlafen”. On en revient toujours à ça.

Et puis, comme le disait Robert Lepage: “on ne fait pas d’Hamlet sans casser d’oeufs”.