mardi 19 octobre 2010

Othello// Shakespeare // Thomas Ostermeier // Schaubühne

Thomas. Ostermeier. Lui je l’aime. Et aussi l’acteur qui joue le rôle de Iago: Stefen Stern (mon futur époux). En fait, je me demande même pourquoi la pièce s’appelle Othello et pas Iago. Et je ne sais pas non plus pourquoi avant d’avoir vu cette mise en scène, je ne m’étais jamais posé la question. C’est épouvantable. Mais je pense que, dans mon for intérieur, je méprise plus Othello que Iago. Non, mais tsé avoir une confiance aveugle envers son Général plutôt qu’envers sa femme… Anyway. Beaucoup de questions se posent avec ces choix dramaturgiques de Marius von Mayenburg (qui figure aussi sur ma liste potentielle des personnes à épouser).

D’abord: Othello n’est pas africain. Clairement. Pourquoi? On a souvent fait les rapprochements cheesy avec le côté sombre de sa personnalité… Et c’est pas parce que Shakespeare dit que c’est un black que ça doit nécessairement être joué par un black. Merci Marius de pousser plus loin les mots shakespeariens! Au sens métaphorique, c’est extraordinaire. J’ai pas de réponse unique. Mais l’aspect rituel avec la boue qui recouvre le corps d’Othello -dans la magnifique scène d’ouverture- et le jeu d’éclairage avec son visage, projeté sous différents angles sur les écrans, suffisent à apaiser ma soif de comprendre: l’être humain est beaucoup plus complexe qu’on le pense. Qu’importe sa couleur.

Mais pour faire court, Othello aime. Aveuglément. Il fait confiance à Iago. Aveuglément. Othello aime. Point. L’amour rend fou.

Et c’est pourquoi ici Iago devient un personnage encore plus complexe avec ce qu’en fait Ostermeier. Iago est certes le personnage de Shakespeare considéré comme le pire des traites. Mais ici il n’est pas seulement celui qui cherche à se venger simplement parce que Othello a préféré Cassio pour lieutenant. Nah. Iago est un habile manipulateur. Le plus doué des acteurs. Il maitrise l’art du langage comme un Dieu. Et il n’agit pas comme un cave juste parce qu’il est assoiffé de pouvoir. Nah. Je trouve ça un peu réducteur de toujours donner cet unique caractère à Iago. C’est plus que ça. Iago aime. Il aime le mal. La destruction. Le jeu. Et quand on aime, on est prêt à tout. Iago improvise. Fin démiurge, il sait comment arriver à ses fins. Irrésistible séducteur. Ses paroles sont un envoûtement. Au fur et à mesure, il rend fou de jalousie Othello.

Et la jalousie est à la base de cette pièce. La jalousie dans tous les sens du terme. Iago aime. Point. Relation amour/haine avec Othello. Du moins, c’est ce que suggère l’interprétation Ostermeier/von Mayenburg. Et ils n’ont pas complètement tort. Et puis, on est loin de tomber dans les clichés insipides. Nah. Tout est habile. Avec un doigté allemand. C’est terrible. La tension entre Eros et Thanatos. Les fantasmes de l’animalité. A l’état brut. “Les hommes sont des estomacs. Nous sommes leur nourriture. Ils nous dévorent avec appétit. Quand ils ont terminé, ils nous vomissent.” Emilia, Acte IV

Et la scéno… et la musique… et les acteurs… ! Moi, payer 8 € pour voir des affaires de mêmes, je suis prête à jeûner si y faut. C’est une drogue, ce lieu-là. On peut dire qu’ils ont du budget (+/- 15 millions €…) Sérieux. C’est dérangeant. C’est pas juste des projections, c’est un grain de film travaillé. Des musiciens live. Tout est à la fine pointe de la technologie. Et la seule affaire étrange dans cette mise en scène, c’est que j’ai pas vraiment compris l’utilité de l’eau. C’est ben beau. Esthétiquement. On comprend qu’on a ici beaucoup de cash pour investir dans un système d’évacuation ET pour ne pas électrocuter les acteurs, qui ont à la fois les deux pieds dans l’eau et un micro AVEC un fil dans les mains. On aime ça de l’eau sur une scène. On aime ça vivre dangereusement. Mais encore. Quand on éclabousse les gens de la première rangée juste pour la beauté du geste… je sais pas. Marius, Thomas: pourquoi tant d’eau?

Ah oui! En passant les boys, vous faites une ben bonne job avec vous sous-titres en français. Mais “Bienvenu” ça prend un “e” à la fin. Et les noms communs en français n’ont pas de majuscules. Moi je dis ça de même, mais si vous avez besoin d’aide pour la correction… Je suis votre femme. Pour le meilleur et pour le pire.

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